mardi 26 décembre 2017

Igor Dubrovsky



Si j'ai toujours considéré les voyages comme une façon d'aller découvrir une nouvelle facette du monde, des cultures et des sociétés différentes, de la gastronomie, de la politique et de la philosophie, j'ai récemment découvert que voyager était une façon de partir à la rencontre de soi. Car on est jamais plus seul avec soi même que confronté à l'inconnu. C'est alors que l'on se tourne vers sa faculté d'adaptation, que l'on se confronte à son aisance sociale, que l'on se livre à sa confiance en soi. Quand le billet d'avion se transforme en invitation à l'introspection, l'allégorie de la caverne n'a plus rien d'une phrase que l'on cite au bac de philo en espérant décrocher la moyenne. J'ai découvert tout cela lors de mon premier voyage seul en Écosse, il y a de cela un an et quelques semaines.
Il y a deux mois, j'étais au Mexique avec mon frère. C'était la première fois depuis l'âge de 11 ans que je remettais les pieds dans un pays qui n'appartenait pas au vieux continent. Quelle allégresse, quelle stupéfaction ! J'y ai découvert de nouvelles façons de penser les rapports humains, sociaux, le rapport au travail, à la religion, au mysticisme, à la vie, à la mort. Il serait juste de dire que celui que j'étais a laissé une part de lui là bas et que j'en suis revenu grandi, avec une nouvelle vision de la vie en générale. Je pourrais entrer dans un monologue interminable pour décrire ce que j'y ai vu et ce que j'y ai vécu, mais cela se trouve déjà sur un cahier de voyage que j'ai rempli à mon retour; de plus cela fait parti de ces choses qui ne se racontent pas mais qui se vivent.
Avant de partir je me suis toujours dis que le jour où je trouverais la fille à côté de qui je voudrais me réveiller tous les jours, nous partirions faire le tour du monde, ou bien que je partirais seul un jour ... un jour ... Sauf que je ne rattachais rien derrière ces mots. C'était des paroles pleines d'espoirs avec peu de concrétisation derrière. A mon retour l'évidence m'a frappée. Je suis fait pour voyager. Moi qui n'ai jamais su dire d'où je venais dû aux nombreux déménagements que j'ai vécu étant petit. Je me suis attardé il y a deux jours sur une phrase de Saul Williams dans le morceau "Sea Lion" de Sage Francis où il dit "I've planted seeds and plan to watch them grow" ... en 2017, sommes-nous aussi sédentaires que l'étaient nos ancêtres ? La réponse est négative pour ma part. Je ne me vois pas planter des graines, attendre qu'elles poussent à un endroit donné, établir un empire sur des bases géographiques immuables. Comme le fait comprendre le film Big Fish; à chaque poisson sa marre, sa rivière, son fleuve, son océan; plus le poisson grandit, plus il doit changer d'environnement. Je trouve que c'est une belle métaphore pour le développement personnel... enfin du moins pour le mien. Je conçois bien entendu que certains n'aient nullement le goût du voyage, de l'inconnu et du différent.

Je n'ai jamais aimé faire ce qui avait déjà été fait, refaire plusieurs fois la même chose ou tomber dans une routine. Il a toujours fallut que j'aille voir ailleurs, que je casse la routine à un moment donné, que j'étouffe la quiétude routinière de la vie sous l'oreiller de l'inconnu, de l'incongru, du différent. Cela m'aide à mieux dormir.

Alors oui la voilà l'apologie du marginalisme. Oui. Gardons le symbolique mais faisons fi du traditionalisme. Soyons nous-mêmes, les chemins les plus fréquentés ont déjà été piétinés, alors à quoi bon ? N'est-ce pas plus agréable d'entendre la neige croustiller sous ses pas dans un sentier vierge, que d'entendre le "flic floc" d'une neige devenue eau dans un sentier trop emprunté, trop normatif !?





En cette période de fin d'année, je resterai fidèle à moi même en ne souhaitant pas un joyeux noël (l'absence de majuscule est volontaire) et une bonne année. NON une année ne sera jamais entièrement bonne. Nous sommes responsables de nos réalités subjectives. Nous sommes les peintres et la toile, les sculpteurs et le marbre, les écrivains et la plume. Une année ne sera que ce que l'on en fait, à l'instar de nos vies.

Au Mexique j'ai pu être témoin, durant El Dia De Los Muertos, de la célébration de la vie plutôt que de la déploration de la perte des défunts. C'est une philosophie très lointaine de nos mœurs latins où la mort est encore tabou. Pourtant là est vraiment l'essentiel; ne pleurons pas la perte, célébrons la vie. Ne m'offrez pas des fleurs à mon enterrement car je ne saurais qu'en faire ni les apprécier, faites le de mon vivant. N'attendons pas pour avoir des mots gentils à l'égard des personnes que l'on aime car il sera trop tard une fois l'addition payée. "L'âge d'or", "nos plus belles années", tout ça n'est qu'un ramassis de conneries; en cette époque où ce dont manque le plus l'Homme moderne; à savoir le temps; ne peut être acheté, il est crucial de le prendre pour faire de chaque instant, chaque période de vie, chaque époque, ce fameux "âge d'or"; car si l'on regarde en arrière en se disant que telle période était meilleure que celle que l'on vit actuellement, alors nous vivons dans le remord et le regret. Or notre ultime chambre n'a de place pour le matériel, les remords, les regrets et le regard des autres.

En cette fin de fête de noël 2017, j'espère que vous avez bien mangé, que vos proches vont bien et que vous avez pu partager des moments de vie ainsi que des rires. On s'en fout royalement des cadeaux, la richesse matérielle est obsolète. La richesse de la bouffe tient chaud au cœur. La richesse personnelle transcende les âges.
A l'aube de cette nouvelle révolution planétaire définie par un calendrier scientifiquement inexact, je souhaite à tout un chacun de prendre le temps, d'essayer de comprendre, de s'écouter, de se faire plaisir, de se sentir vivant, d'aimer et d'être aimé; et de se poser de temps en temps la question "qu'est-ce que je voudrais faire quand je serais plus grand ?" car dès lors que l'on cesse de grandir ou que l'on cesse de se projeter ainsi, l'on se refuse le plus beau et le plus unique cadeau que nous ayons; la découverte de nous même au fil du temps.

Je ne le répèterais jamais assez; SOYEZ LIBRES, HEUREUX et CURIEUX. Ne cessez jamais d'imaginer, de créer et de rêver; là réside toute l'essence de nous mêmes.


Je garde mon âme d'enfant, j'acquiers la confiance de l'adulte et j'apprends la sagesse du vieillard.